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L'OMPHALOCELE

L'omphalocèle est une hernie des viscères abdominaux à travers la paroi ombilicale transformée en une fine et fragile membrane dont la rupture constitue un drame néonatal d'une extrême gravité. Le devenir des enfants porteurs de cette anomalie congénitale est lié par ailleurs au terrain ( prématurité, malformations surajoutées ), aux conditions de la prise en charge et aux effets morbides d'une hypertension abdominale créée par la réduction hâtive et forcée des viscères herniés. Les progrés réalisés en néonatologie et la mise au point de procédés & de moyens de réduction progressive ont transformé considérablement le pronostic vital, mais au prix d'une importante morbidité et d'un hospitalisme coûteux...

1. La dissection anatomique met en évidence:

2. C'est la hernie d'une portion plus ou moins importante du foie qui détermine l'importance de la déhiscence pariétale et le volume de l'omphalocèle.
On distingue trois tableaux anatomiques:


le type I :

l'orifice pariétal mesure moins de 5 cm de diamètre, il se prête aisément à la cure radicale en un temps.
A ce type on rattache une forme particulière dite "omphalocèle intra-cordonale", sorte de hernie en plein cordon dont l'implantation pariétale est normale.

 

le Type II

mesurant plus de 5 cm de diamètre définit la "grande omphalocèle" qui peut contenir tous les viscères mobilisables ( intestin, estomac, rate, ovaires...)

 

l'omphalocèle dite 'géante', à contenu hépato-intestinal est

le type III.

L'espace abdominal disponible est si exigu que la réduction de la totalité des viscères exclus est laborieuse, voire impossible; de plus la hernie du foie peut créer
un choc cardiogénique, (syndrome de 'faible débit'), par coudure de la veine cave inférieure.






3. Les remaniement du sac et de son contenu permettent de distinguer par ailleurs:

4. Les critères anatomiques ( types I, II, III ) et évolutifs ( stades A, B, C ), s'intriquent avec les conditions de terrain:

* l'absence d'évacuation de méconium fera évoquer une éventuelle atrésie intestinale sous-jacente,

* l'immaturité des mécanismes thermo-régulateurs et de défense compliquent la prise en charge de l'omphalocèle du prématuré; il en est de même quand d'autres anomalies associées prennent le devant de la scène ( cardiopathie, détresse physique, aberrations chromosomiques...),

* Le "trop bel enfant" au poids de naissance supérieur à 4kg, qu'il soit porteur ou non d'une macroglossie fera rechercher une hypoglycémie, composante du syndrome de Beckwith-Wiedmann 1 , aux conséquences gravissimes quand elle est méconnue.

* Enfin, la septicémie, peu explicite à cet âge, doit être un motif de préoccupation de tous les instants, elle sera évoquée chez le nouveau-né léthargique, hypotherme ou subictérique; les éruptions pétéchiales sont souvent l'unique reflet d'un état septique latent alors que les sécretions bronchiques teintées de sang ou le développement d'un sclérème débutant aux extrémités annoncent l'issue fatale.

5. La cure radicale a pour objectif d'introduire les viscères dans une cavité abdominale au sein de laquelle ils ne se sont pas développés, et de les y maintenir tout en évitant de créer une hypertension intra-abdominale.

Ce programme n'est réalisable dans l'immédiat qu'en cas d'omphalocèle de type I vue tôt, au sac intact et traslucide, sans anomalie associée. C'est rarement le cas.
En fait, la cure radicale en un temps est vivement déconseillée quand l'enfant est reçu au-delà de 48 heures, quand le sac est infecté ou fissuré, ou quand l'état physique est précaire. Il en est de même quand le volume de l'omphalocèle dépasse celui de la cavité abdominale; l'intégration à tout prix du contenu d'un tel sac dans un espace exigu ne fait qu'entraver les mouvements du diaphragme et l'irrigation des organes intraabdominaux, il en résulte un état de détresse ( dyspnée, iléus, oligurie, oedème des membres inférieurs, lâchage des sutures pariétales, acidose métabolique ...) qui devient rapidement irréversible si on s'entête dans cette voie sans issue.

Dans de telles conditions, le programme thérapeutique doit se résumer à l'unique préoccupation: soustraire les viscères herniés au risque de l'éviscération et de l'infection; le reste - réduction, réfection pariétale... - est remis à plus tard, une fois le pronostic vital assuré.
Ce sont les réponses apportées à cette préoccupation qui font qu'une telle malformation est un défi d'actualité.

6. Bien que fragile et avasculaire, le sac omphalique peut rester longtemps intact et susceptible de s'épidermiser à partir des berges cutanées, à condition d'être soustrait aux effets de l'exposition à l'air et de la septicité. Insuffisamment ou mal isolée, la membrane péritonéo-amniotique se dessèche, s'opacifie et s'écaille tout en se couvrant de colonies microbiennes, point de départ - même en l'absence de fissuration - de l'infection péritonéale. De plus, l'éviscération aggrave cet état par le développement de troubles métaboliques ( déshydratation et hypoprotidémie ) dont il faudra tenir compte.

7.Les soins locaux seront pratiqués en milieu aseptique, par le chirurgien lui-même comme s'il s'agit d'une intervention majeure.
L'excès de cordon est ligaturé puis excisé, la paroi abdominale est lavée au sérum salé tiédi, brossée au savon et dégraissée à l'éther puis désinfectée à la Bétadine.
Le sac est ensuite débarrassé de tout dépôt, désinfecté de nouveau et recouvert d'un pansement stérile occlusif non compressif.
On profite de ces soins primaires pour corriger une éventuelle hypoglycémie associée souvent à l'hypocalcémie, on ajoutera à la ration hydrocalorique de la journée un complexe vitaminé ( hydrosol et vitamine K ), un apport protéinique ( plasma ou albumine et de la gammaglobuline en cas d'omphalocèle rompue ) et une couverture à large spectre ( Ampicilline-Kanamycine 2 ). Il est conseillé de réduire au cours de cette préparation le volume du contenu intestinal par siphonage à l'aide d'une sonde naso-gastrique poussée au-delà du pylore combiné à un lavement au sérum salé. Enfin, l'enfant est placé en couveuse, couché sur le côté et changé de position toutes les demi-heure.

8. Les modalités de la cure chirurgicale sont déterminées par le terrain et le volume des viscères herniés. Du point de vue tactique, on dispose de plusieurs moyens:

 

A. L'épidermisation du sac omphalique par contiguïté à partir des berges cutanées:

Le sac est maintenu isolé et aseptique par badigeonnage pluriquotidien à la Bétadine de préférence au mercurochrome. On constate au bout de quelques jours l'apparition d'îlots épidermiques qui confluent progressivement au point de transformer en quelques semaines la membrane omphalique en une nappe épidermisée et résistante.

 

 

B. La couverture des viscères par les téguments adjacents.

Ceux-ci sont mobilisés vers la ligne médiane, en gardant intacte la membrane omphalique ( méthode de Gross ), ou bien après l'avoir excisée afin de s'assurer de l'état du tube digestif ( méthode de Soper ).
Les viscères ainsi réduits occupent un espace interstitiel compris entre les plans cutanés et musculo-aponévriotique. L'omphalocèle est donc transformée en éventration dont la cure sera entreprise plus tard.

 

 

C. La réfection pariétale en un temps comporte:

Cette réfection pariétale est guidée par le degré de tension abdominale dont le reflet vésical est mesuré à l'aide d'une sonde connectée à un tube gradué et constamment maintenu en-dessous de 25 cm d'eau. Au terme de l'intervention, on s'assure de la qualité du confort physiologique de l'enfant par l'observation patiente de la coloration des extrémités, du rythme respiratoire et au besoin par les données gazométriques. Au moindre doute, ou si on hésite à défaire la plastie pariétale, le recours à la ventilation assistée ( à pression positive et sous curarisant ) reste le moyen de contrôle barométrique le plus fiable à condition d'accepter et d'assumer les servitudes qu'il impose.

D. L'intégration progressive consiste à substituer à la membrane omphalique - extrêmement fragile- un sac en matière synthétique assez résistant pour supporter les manipulations externes en vue de pousser les viscères dans la cavité abdominale sans perturber l'hémodynamique viscérale..

C'est à Schuster qu'on doit la mise au point de ce procédé qui a transformé le pronostic de l'omphalocèle. Le matériel utilisé au départ est une membrane en dacron siliconé (Silon®), d'autres substances à l'étoffe moins rigide ont été introduites comme le Teflon® ou l'Op-Silon®; ce dernier est livré en feuille transparente, très souple, non poreuse bien qu'elle soit - semble-t-il - perméable aux gaz, elle aurait par ailleurs un pouvoir bactéricide .

Le coût élevé de ces membranes synthétiques en limite l'utilisation dans notre milieu. Aussi, avons-nous adopté l'usage - proposé par Ugbam - du banal sac de perfusion aux avantages indéniables: matériel prêt à l'emploi, stérile, malléable, transparent et imperméable aux germes. Après excision du sac omphalique, le matériel synthétique est transformé en cône dont la base est amarrée aux berges de l'aponévrose pariétale ( procédé de Schuster) ou de préférence au pourtour cutané ( méthode de Cordero). Le volume du cone est progressivement réduit par étranglement jusqu'à l'intégration complète des viscères.
L'usage de ce matériel n'est pas sans inconvénients. Etant de texture inerte et en permanence exposé à l'air, il constitue un milieu de culture de choix pour les colonies microbiennes et principalement pour les candidas 3 qui essaiment rapidement vers la
cavité abdominale à travers les points d'ancrage de la membrane. L'apparition d'un muguet en est l'annonce, l'administration de Nystacine®4 per os et en badigeonnage ne doit pas attendre la confirmation biologique.

E. La cure de l'éventration conséquence de la plastie de Grob ou celle de Gross est une étape laborieuse et non dépourvue de risque. En effet, il s'agit d'une éventration très atypique en raison tout d'abord des adhérences très serrées qui se sont développées entre les viscères (foie, intestin) et les plans superficiels. D'autre part, elle n'a aucun effet positif - de par sa nature - sur la capacité de la cavité abdominale qui reste exiguë et dont l'agrandissement est un préalable à la réfection anatomique de la paroi.
On dispose de deux artifices pour créer l'espace nécessaire à l'intégration définitive des viscères.

9. Indications thérapeutiques:
La multiplicité des aspects anatomo-cliniques crée plusieurs situations que nous résumons comme suit:

Type d'omphalocèle Variété Omph. 'fraiche' Omph. infectée Omph. rompue
Petite I Cure radicale immédiate
Grande II Gross Gross ou Grob Gross
Géante III Schuster Grob Schuster

En fait, les situations vécues sont moins tranchées et plus complexes que celles résumées dans ce tableau quand on prend en considération les autres paramètres de risque: anomalie digestive associée, prématurité, dysmétabolisme, cardiopathies... il n'en reste pas moins que des impératifs doivent être soulignés:

  • La réfection pariétale doit être entreprise chaque fois qu'elle s'avère réalisable.
  • La protection des viscères doit rester la principale préoccupation du moment.
  • La protection par les téguments est plus sûre que l'utilisation d'une membrane artificielle quelle que soient ses qualités.
  • Le matériel synthétique est formellement contrindiqué sur terrain infecté.
  • La méthode de Grob reste le procédé de choix chez le prématuré à omphalocèle remaniée, chez le nouveau-né en état de détresse physiologique ou pris en charge au-delà de la première semaine.
  • L'éventualité d'une mise au repos du tube digestif pour une durée de plus d'une semaine implique le recours à l'alimentation parentérale 5.
  • Enfin conseiller les futures mamans à pratiquer une échographie foetale dès la 12° semaine de grossesse, âge à partir duquel la présence du sac permet de différencier l'omphalocèle du gastroschisis et de planifier la prise en charge périnatale.